L'INSTABILITE LOMBAIRE |
Drs P. Béraud et P. Stora
LE
POINT DE VUE MÉDICAL
Toute lombalgie survenant chez un
sportif doit être soigneusement analysée pour en déterminer la cause et
rechercher l'existence d'une insuffisance discale, associée ou non à une
instabilité.
I - L'insuffisance
discale.
C'est un syndrome clinique basé sur
l'anamnèse et l'examen, qui traduit un dysfonctionnement iner-vertébral dans
son ensemble.
Il se manifeste essentiellement par une
lombalgie chronique d'intensité variable. Une prédominance latérale marquée
peut attirer l'attention sur la participation éventuelle d'une ou plusieurs
articulations inter-apophysaires.
On peut distinguer 3 stades (Troisier) :
-
Stade I qui correspond à une pathologie de la position extrême
-
Stade II caractérisé par des douleurs brèves et brutales
-
Stade III où il existe un fond douloureux permanent.
L'atteinte dégénérative d'un ou
plusieurs disques est beaucoup plus fréquent
chez
les sportifs, tant en précocité et en intensité qu'en nombre de disques
concernés par rapport à une population témoin (Sward).
L'IRM est l'examen de choix pour
apprécier la qualité du tissu discal. Cet examen permet de découvrir
éventuellement une protrusion ou une hernie discale qui peuvent également être
des facteurs de lombalgies.
L'atteinte discale est volontiers
associée à une atteinte des articulations inter-apophysaires dont on sait
qu'elles sont particulièrement surmenées chez le sportif.
II - L'instabilité.
Il s'agit d'un concept biomécanique caractérisé par une mobilité anormale entre
deux vertèbres dans l'un ou plusieurs des trois plans : sagittal, frontal,
axial.
Les manifestations cliniques sont
variables allant de l'indolence totale jusqu'à des algies de nature et
d'intensité variables.
a
- L'instabilité peut être purement clinique :
Les radiographies dynamiques sont
normales. Si l'IRM et la discographie renseignent sur l'état du tissu discal, elles ne donnent aucune
information sur l'instabilité elle-même.
b
- L'instabilité peut être radiologique :
C'est alors une notion dynamique.
Les clichés habituels ne donnent qu'une
image instantanée. Il faut donc pratiquer les clichés en position extrême et
comparer le déplacement ainsi obtenu. Il s'agit des clichés dynamiques en
flexion/extension et en inclinaisons latérales mais le déplacement anormal peut
se faire également dans le sens de la rotation au mieux analysé par la TDM.
A côté des clichés dynamiques il faut
rechercher des signes radiologiques indirects d'instabilité sur les clichés
standard :
- le baillement anormal des articulaires
postérieures sur le cliché de profil ou au scanner
- la rupture du cintre articulo-lamaire
- évaluer enfin sur des clichés
successifs le caractère évolutif d'une sub-luxation discale ou articulaire
postérieure (il faut donc pouvoir disposer dans le temps de clichés
successifs).
On doit accorder également de
l'importance à :
- une image de vide discal, centrale,
plus ou moins étendue, qui traduit une deshydratation discale, souvent avancée
et probablement responsable de mouvements anormaux;
- une clarté gazeuse dans les
articulaires sur les clichés sans
préparation ou au scanner;
- l'ostéophytose vertébrale antérieure
de traction décrite par McNab (décalée de quelques millimètres par rapport à
l'angle vertébral, petite et horizontale);
- l'arrondissement et la condensation de
l'angle antéro-supérieur d'un corps vertébral.
Au total, on arrive ainsi sur les
clichés radiologiques et sur le scanner à approcher le diagnostic radiologique
d'instabilité vertébrale, mais aucune image n'est absolument spécifique en soi.
On
peut ainsi schématiquement différencier 3 stades à l'instabilité lombaire :
- Stade I : il s'agit d'un sujet
qui présente occasionnellement ou à la suite d'un faux mouvement (en
particulier lors du sport) un accident aigu d'instabilité lombaire fait d'un
blocage lombaire, avec ou sans attitude antalgique.
Le traitement est médical : repos,
antalgiques voire anti-inflammatoires, et surtout la manipulation vertébrale
qui trouve là son indication de choix.
- Stade II comprend en général
des blocages à répétition ou des douleurs après chaque effort qui se
reproduisent lors de gestes de plus en plus minimes, ce qui gêne considérablement l'activité sportive.
On
peut distinguer deux situations :
• soit
les disques sont de bonne hauteur
Après
échec d'un traitement médical correctement suivi (repos sportif , AA+AI, 15
jours, corset, pas de rééducation) on fait une IRM ou un scanner. Si l'on
découvre une hernie discale on peut aller jusqu'à la discographie pour
rechercher le caractère symptomatique à la mise en tension d'un disque
pathologique. Si elle existe, certains proposent un traitement percutané de
décompression intra-discale par nucléotomie ou nucléolyse, lorsque les rechutes
deviennent trop fréquentes.
• soit
les disques sont déjà diminués de hauteur
Toujours
après échec du traitement médical, il faut réduire l'activité sportive (ceci
n'est pas toujours facile) ou poursuivre le traitement médical en faisant des
infiltrations par voie épidurale ou articulaire, demander au sujet de porter un
corset rigide ou un lombostat, relayé ensuite par une rééducation adaptée avant
la reprise prudente et progressive des activités sportives.
- Au stade III
La
douleur lombaire est devenue chronique. Les accidents de blocage et
d'instabilité sont constants à la moindre tentative d'activité sportive.
Sur les clichés radiologiques la
discopathie est évidente à un ou plusieurs étages.
Il faut tenter encore de poursuivre le
traitement médical, mais en cas d'échec on peut espérer une restabilisation naturelle secondaire. Si tel
n'est pas le cas, force est d'envisager une solution chirurgicale.